18.8.08

554 - GRD

Prendre la file d’attente, moteur allumé, musique. Petites actions routinières de nos vies banales. Mais j’ai toujours de la musique, mon entorse bénigne.
D’autres, c’est la radio. Certains, c’est ce dont ils causent, s’ils ne sont pas seuls à « faire » de l’essence, qui fait bruit.
Mais même les pas seuls sont parfois silencieux.
L’un descend de sa voiture, pour remplir le réservoir. L’autre, ben l’autre est seul dans la voiture. Ou avec les gosses. Le chien. Non, pas avec le poisson rouge.
Donc se tait.
Ecoute la radio, ou de la musique, ou rien. Parfois, on n’écoute rien. Même pas le silence, ni ses pensées.

[Rien. On est là et on attend. Dans cette zone d’attente où l’immobilité renvoie à l’importance de ce qui nous fait attendre. Plus l’objet de l’attente est banal, moins on est. C’est peut-être pour cela que certains, relégués en zones de rétention, gardent fières allures. La gravité de leur attente leur confère une forme très particulière de dignité, unique, comme leurs vies.]

Nous, après, quand ce n’est que pour du carburant… à part râler sur son coût, de quoi sommes-nous encore capables ?

J’étais dans la file. Pour du carburant. Normal, sans carburant je suis immobile. Et je déteste ça. Être immobile. J’ai besoin de pouvoir me déplacer, et dans nos campagnes même pas périurbaines, mais des vraies campagnes, donnez moi des chevaux, fiscaux !
Dans la file, vu que je sais que je dois attendre, je m’organise dès que je sais que je vais dans la file. D’essence.
Pas d’être, mais de carburant. (!).

L’attente parfois pèse. Pas pour moi, vu que je sais que je vais attendre. D’où des trucs à écouter. Des musiques. Des musiques car j’attends seul. Et je ne sais pas comment faire sans musiques.

Et donc je regarde. J’observe.
Mes yeux naviguent, scrutent, balayent.
Mes yeux sont comme autonomes, vu que j’écoute de la musique. C’est un regard en pilotage automatique, qui regarde sans voir.
C’est souvent comme ça, dans les files d’attente, je regarde sans voir et n’éprouve pas de pensées particulières. Cela doit être ça, l’attente.

[Une moment de vie en « pause ». Faut juste être un peu vigilant, et ne pas transformer toute sa vie en pause.]

Et mes yeux se portent sur la voiture qui me précède.

Tous, nous posons nos yeux vides devant. Et voilà que j’identifie un local, du même département.
Et voilà que cela se précise, vu le nom du garage qui se trouve au bas de la plaque d’immatriculation.

J’insiste. Je n’espionne pas. Je suis en pilotage automatique.
Tout cela se fait en très peu de temps, même si nos non-pensées nous éloignent dans la langueur de la file d’attente à nous rendre aussi inerte qu’un sac de sciure compressé.
Tous, nous suivons ceux qui nous précèdent (même si je ne veux pas que celui qui me suit me suive). Et tous, nous lisons. Même les grosses affiches de pub, surtout même, elles sont là pour ça, même dans nos campagnes. Pas de répit.

Je vois un autocollant collé à l’arrière de la voiture (oui, c’est là que les autocollants sont lisibles. Ils sont exactement là pour être lus par ceux qui suivent). Ovale. Des initiales. 3 lettres. Et un texte plus petit, illisible d’où je suis (faut plus de 6 mois d’attente pour un rendez-vous chez l’ophtalmo). Mais cela ne m’intéresse pas. Pas envie de savoir. Cet autocollant, sur la voiture devant, ne m’intéresse pas. Les automobilistes parfois collent n’importe quoi sur l’arrière de leurs voitures.

3 lettres. GRD.

M’en détourne. Attend mon tour. Je repasse inlassablement le même titre musical, c’est souvent comme ça, quand il m’arrive de tomber en grâce sur un titre. Il tourne en boucle, sans jamais me lasser. Il m’isole dans une bulle de confort et de certitudes.

[D’autres écoutent l’officiel amuseur du service public (en vacances, car c’est épuisant d’amuser publiquement, surtout qu’il y a en plus des rencontres avec les têtes couronnées, car bien nées, dont il est devenu l’attaché de presse permanent). Mais je m’égare. C’est comme cela, comme dans les files, il n’y a rien de structuré, l’esprit erre, absent. D’aucuns (j’adore employer « d’aucuns », je trouve cela très vieille grammaire bien dans l’esprit très vieille France d’aujourd’hui), d’aucuns souhaiteraient que cette errance soit l’état permanent de nos esprits. Ils s’y emploient avec un acharnement qui porte ses mauvais fruits. Rendre totalement abruti tout un peuple, voilà leur mission.]

Puis c’est le tour de la voiture avec l’autocollant GRD. Elle se déplace, s’aligne avec la pompe, le conducteur descend. Il lui faut du temps, pour descendre. Il fait beaucoup bouger la voiture, puis, finalement, la portière s’ouvre et deux pieds, avec des sabots aux semelles surcompensées précèdent tout le corps. Qui est maintenant là, debout, immobile devant la pompe.

C’est un nain.

Oui, je sais, on dit « personne de petite taille », ou une autre expression lisse. Faudra apprendre la novlangue dès la maternelle (si elle n’est pas supprimée).

Un nain, sans bras.

Là, je ne connais pas l’expression adéquate. Si quelqu’un a une idée…

Il a un long pull informe sans manches. Pas besoin de manches, il n’a pas de bras.
Ce que je veux dire, c’est que son pull informe n’a pas d’ouvertures pour les bras.

Il reste là, debout, face à la pompe et attend. Il regarde de temps en temps l’employée dans sa «guérite » vitrée, elle le regarde. Je suppose que c’est elle qui est pressentie pour venir décrocher le robinet. Mais il y a du monde, qui attend pour payer. Faut pas faire attendre ceux qui ont fait de l’essence. Ils sont très impatients de payer. Encore un trait du caractère humain qui m’échappe.

Il y a du monde, là, un peu partout, qui se sert en carburant, ou a terminé, et qui dans tous les cas, attend.
Et le nain sans bras (je vais employer « il » pour le désigner), donc il reste là, immobile, face à la pompe. De temps en temps, il tourne la tête vers l’employée.

Je ne sais pas combien de temps cela a duré. Pas longtemps. Mais le temps s’était arrêté. Totalement figé. Il y a des scènes de la vie qui acquièrent un caractère d’éternité. Celle-ci en est une. Elle se déroule encore et encore. Là, devant mon regard un peu moins éteint.

Je descend, lui propose mon aide, il me dit qu’il veut 20 euros de SP 98, je prends le pistolet puis tente de m’acquitter de ma mission. Ce n’est pas facile, de faire 20 euros pile. Je ne m’en sors pas si mal et même assez bien puisque je fais 20,02. C’est comme un jeu. Il y a ceux qui font des pleins et ceux qui doivent respecter un montant. Et là, faut jouer de la poignée. Rester concentré pendant toute l’opération.

[On pourrait d’ailleurs organiser des jeux aux pompes. Par exemple, donner aux automobilistes un montant précis (genre 32,48 euros), et celui qui l’atteint le premier gagne une petite sapinette en carton qui s’accroche au rétro et parfume l’habitacle en lilas synthétique. Je suis certain que cela mettrait de l’ambiance dans les stations et qu’on ne manquerait pas de candidats. Nous vivons l’ère de la compétition absolue. Voyez le nombre de milliards à être à la fois spectateurs, acteurs et surtout victimes de la compétition. Parfois, ce sont les mêmes.]

Pendant ce temps, il est parti payer et moi, je ferme son bouchon du réservoir, me déplace vers le distributeur, enclenche le robinet sur son support puis retourne dans ma voiture.
20,02, c’est pas mal, non ? Ce n’est pas si simple, avec l’affichage digital. C’est qu’il faut doser soigneusement la pression sur la poignée du pistolet. Je ne savais pas que je possédais un tel talent. En plus, j’étais très fier d’avoir réussi à tenir les 20 euros. Je ne sais pas pourquoi, mais cet acte très banal m’a bouleversé.

Il revient, me remercie encore, je lui réponds vaguement que c’est normal.
Je ne me demande même pas comment il a payé ni plein d’autres trucs.
J’avais des tas de trucs en têtes qui arrivaient plus vite qu’une étoile filante, mais je suis resté muet. Ces tas de trucs en têtes y sont encore. Pour longtemps encore. Très longtemps.

Il se baisse un peu, ouvre la portière de sa voiture avec ses dents, se hisse sur le siège conducteur, la voiture bouge beaucoup, car il doit quand même (je suppose) s’harnacher en s’aidant de ses pieds, ferme la portière en accrochant les orteils du pied gauche au vide poche intérieur, s’installe, démarre et s’en va.
J’ignore tout des aménagements intérieurs qui lui permettent de conduire.
Il lui faut encore attendre que la voiture qui le précède passe la guérite de péage.

Je me rapproche, pour commencer à m’aligner avec le distributeur de carburant.

GRD ?
Et là, ce qui était illisible le devint.
Présipauté De Groland !

J’ai décroché le robinet, fait un plein, démarré, me suis garé devant la guérite, j’ai salué l’employée (que je connais, ici, c’est assez petit, ce qui rend les gens connaissant et parfois même assez agréables à côtoyer), je lui ai tendu ma carte bancaire, tapé mon code, repris ma carte et le reçu, j’ai rangé le tout rapidement dans une poche de mon pantalon, je suis rentré chez moi.
J’étais encombré avec mes achats (faits avant de passer acheter du carburant), j’ai eu du mal pour ouvrir la porte, la clé est tombée une fois, je me suis baissé pour la ramasser avec les paquets et sacs tenus tant bien que mal.
Finalement, j’ai réussi à ouvrir la porte, à rentrer chez moi.
J’ai tout posé, j’ai commencé à ranger.
Je me suis arrêté. J’ai tout laissé en vrac, un peu partout.
Je me suis assis sur une chaise et je crois que j’ai pleuré.

14.8.08

552 - W-S Burn

Ce sera juste l'entame.
Encore moins qu'une introduction, ou un prologue.

Et ce sera à vous d'écrire ou d'imaginer la suite.
De la créer.
D'y aller.

Car là, je ne sais pas.
Il y a chez W-S Burn quelque chose qui est de l'ordre du défi.
Une ode qui défie.
A la première écoute, c'est tellement étrange et d'apparence si "bancale", qu'il y a comme une volonté de ne pas sonner disons "juste", c'est à dire comme on a l'habitude que sonne un duo.
Avec une voix bien placée et de la musique pour tout envelopper.
Pas ici.

La voix est un instrument parfois déroutant, et celle de Pixie est le dernier fil.
Exactement le dernier fil.

Et pourtant, c'est ce qui fait la force même de cette voix. Frêle mais sans éprouver le moindre doute sur sa capacité à retourner ce qui pourrait être une faiblesse en une force merveilleuse, celle de la singularité d'une exquise étrangeté.

A vous d'imaginer la suite, maintenant.

12.8.08

551 - CNR


Mise à jour du 21 septembre 2008.
Le passant est ici chez lui, et donc, comme ce n'est pas un lieu où des malappris peuvent déposer des commentaires peu estimables, le passant supprime.
A bon entendeur...

Et pour préciser de quoi il est question :

Appel à la commémoration du 60e anniversaire du Programme du Conseil national de la Résistance du 15 mars 1944.

Au moment où nous voyons remis en cause le socle des conquêtes sociales de la Libération, nous, vétérans des mouvements de Résistance et des forces combattantes de la France Libre (1940-1945), appelons les jeunes générations à faire vivre et retransmettre l'héritage de la Résistance et ses idéaux toujours actuels de démocratie économique, sociale et culturelle.

Soixante ans plus tard, le nazisme est vaincu, grâce au sacrifice de nos frères et soeurs de la Résistance et des nations unies contre la barbarie fasciste. Mais cette menace n'a
pas totalement disparu et notre colère contre l'injustice est toujours intacte.

Nous appelons, en conscience, à célébrer l'actualité de la Résistance, non pas au profit de causes partisanes ou instrumentalisées par un quelconque enjeu de pouvoir, mais pour
proposer aux générations qui nous succèderont d'accomplir trois gestes humanistes et profondément politiques au sens vrai du terme, pour que la flamme de la Résistance ne s'éteigne jamais :

• Nous appelons d'abord les éducateurs, les mouvements sociaux, les collectivités publiques, les créateurs, les citoyens, les exploités, les humiliés, à célébrer ensemble l'anniversaire du programme du Conseil national de la Résistance (C.N.R.) adopté dans la clandestinité le 15 mars 1944 :

Sécurité sociale et retraites généralisées, contrôle des « féodalités économiques », droit à la culture et à l'éducation pour tous, presse délivrée de l'argent et de la corruption, lois sociales ouvrières et agricoles, etc. Comment peut-il manquer aujourd'hui de l'argent pour maintenir et prolonger ces conquêtes sociales, alors que la production de richesses a considérablement augmenté depuis la Libération, période où l'Europe était ruinée ?

Les responsables politiques, économiques, intellectuels et l'ensemble de la société ne doivent pas démissionner, ni se laisser impressionner par l'actuelle dictature internationale des marchés financiers qui menace la paix et la démocratie.

• Nous appelons ensuite les mouvements, partis, associations, institutions et syndicats héritiers de la Résistance à dépasser les enjeux sectoriels, et à se consacrer en priorité aux causes politiques des injustices et des conflits sociaux, et non plus seulement à leurs conséquences, définir ensemble un nouveau « Programme de Résistance » pour notre siècle, sachant que le fascisme se nourrit toujours du racisme, de l'intolérance et de la guerre, qui eux-mêmes se nourrissent des injustices sociales.

• Nous appelons enfin les enfants, les jeunes, les parents, les anciens et les grands parents, les éducateurs, les autorités publiques à une véritable insurrection pacifique contre les moyens de communication de masse qui ne proposent comme horizon pour notre jeunesse que la consommation marchande, le mépris des plus faibles et de la culture, l'amnésie généralisée et la compétition à outrance de tous contre tous. Nous n'acceptons pas que les principaux médias soient désormais contrôlés par des intérêts privés, contrairement au programme du Conseil national de la Résistance et aux ordonnances sur la presse de 1944.

Plus que jamais, à ceux et celles qui feront le siècle qui commence, nous voulons dire avec notre affection : « Créer, c'est résister. Résister, c'est créer. »

Signataires :
Lucie Aubrac, Raymond Aubrac, Henri Bartoli, Daniel Cordier, Philippe Dechartre, Georges Guingouin, Stéphane Hessel, Maurice Kriegel-Valrimont, Lise London, Georges Séguy, Germaine Tillion, Jean-Pierre Vernant, Maurice Voutey.

www.alternatives-images.net



550 - La case de l'Oncle Tom Waits "Glitter and Doom"


Un témoignage de la tournée "Glitter & Doom", en cours.
Une approche essentielle. Que nous dit Tom ?
Tom nous dit la vie.

Des photos de son passage au Grand Rex par ici, chez CitizenJazz.

11.8.08

549 - Se perdre, ne plus savoir d'où l'on vient

Parfois, le passant est perdu.
Toutes ces voies, ces chemins, ces pistes parcourues.
Et au bout, la perte.
Lentement, les sens absorbés par des visions sonores, le pas parfois hésitant.
Sans destination précise, sans envie réelle d’arriver, seulement guidé par une farouche attention aux accidents de rencontre.

C’est cela, le bonheur du passant. Ne pas avoir pour guide autre mentor qu’un pur hasard.

Comme d’autres, et soudainement, je réalise parfois que je suis perdu.
Perdu, car je ne sais comment je suis arrivé là.
Être perdu, ce n’est pas ignorer le chemin pour revenir, car nous savons comment bâtir des citadelles et surtout comment les rendre habitables.
Être perdu, c’est ne plus avoir connaissance du chemin emprunté.
Celui qui nous a mené là où nous sommes.
Ici.
Là où je suis. Aux côtés de tous.
Être perdu ne signifie pas ne pas savoir comment rentrer.
Je sais comment rentrer. Toujours.
Parfois, j’ai même marché droit devant.
Rarement, mais cela m’est arrivé.
C’est dans ces cas là qu’il y a toutes ces routes encombrées.
Là où parfois d’étranges semblables m’enjoignent au renoncement.
A la soumission.

Non.
Perdu.
Je suis perdu car j’ignore tout des méandres qui m’ont mené là où je suis.
Là où je suis perdu.
Là où j’ai récolté des sons & des voix sans savoir où je les ai récolté. Ni comment.
Être perdu, c’est ne pas savoir (se souvenir) d’où l’on vient, qui on est.
Être perdu, c’est oublier.

Oublier qui on est, la somme de tous les nous qui nous rend unique.
Comment nous sommes arrivés là ou nous sommes.
Tout en ayant glané des sons (des voix & des musiques).
Mais c’est aussi réel pour toutes le vies.
Celles qui sont meurtries.
Par ceux qui dictent des chemins nouveaux, qui trouvent leur origine dans des temps anciens, ceux de la démesure te de la compétition.
Des voix expriment cela nettement mieux que le passant.
Des voix posent l’horreur de l’oubli des chemins empruntés, qu’on nous force à emprunter puis à oublier que nous l’avons fait.
Mais ces voix sont de peu de poids, face à ceux qui nous volent nos chemins, nos sentiers.
Elles disent l’horreur de la perte, l’horreur de l’oubli et de l’unique chemin imposé.
Merci à toutes ces trop rares voix libres.
Se perdre, oublier d’où nous venons et comment nous y sommes arrivés est la pire chose qui nous arrive.
Car c’est se déplacer sans savoir.
C’est arriver nulle part. Dans un monde unique fait pour la multitude qu’il faut divertir.
Alors qu’il y a tant de dédales pour les uniques.
C’est marcher comme d’autres errent.
C’est surtout ne pas prendre le temps d’explorer d’autres voies, d’autres chemins.

Se perdre, c’est oublier le chemin qui nous a mené là où nous sommes, perdus.
C’est oublier nos pas, les chemins empruntés, les voies cheminées, les sentes foulées.
C’est ne pas savoir comment on parvient.
D’où on arrive.
Par quels chemins.
C’est l’histoire du poucet, petit, qui devait, pour ne pas se perdre, savoir quel chemin il empruntait.
Être perdu, c’est ne pas savoir d’où on vient.
C’est oublier de parler, c’est devenir amnésique, c’est ne plus savoir à qui parler, c’est perdre même la parole.
Être perdu, c’est devenir muet.
Être perdu, c’est la volonté de ceux qui nous fabriquent des stases et des métastases.
Ce monde est régit par des criminels passifs, uniquement concentrés sur des accumulations.
Il faut aller vite pour accumuler.
Le lent parfois est un danger, car il explore d’autres pistes et, parfois, entraîne avec lui d’autres passantEs.

Notre merveilleuse machine à souvenirs est encombrée par toutes les données fournies par les joueurs de flûtes de notre siècle entamé. Le Fleuve nous attend.

10.8.08

548 - Arvo Pärt De Profundis




Ecouter ces chants & musiques est une tentative d'approche.
De la beauté.

(liens dans le commentaire)

8.8.08

547 - Jessica BAILIFF "Feels like home"


1/ What's Inside Your Mind?
2/ We Were Once
3/ Lakeside Blues
4/ Brother La
5/ Persuasion
6/ Cinq
7/ Spiral Dream
8/ Evidence
9/ Pressing
10/ If We Could
11/ With You


La brume se dissipe très lentement. Depuis le sommet de la colline, je sais bien que derrière ce voile blanchâtre, il y a des couleurs, des lumières, des sons, des parfums.
De la vie.
J'attends avec beaucoup de bonheur que toute cette vie se donne à voir.
Mais je ne suis pas pressé.
J'attends.
Jessica joue et chante.
Pourquoi vouloir tout trop vite.
Ah, écouter Jessica permet de ressentir avant de voir.
Le bonheur.
Alors le brume peut bien tarder à disparaître, cela n’a plus d’importance... La brume n'empêche pas de voir ni de sentir.

(lien dans le commentaire)

546 - The Ex & Tom Cora "Scrabbling at the lock"




Terrie - guitar
G.W. Sok - voice
Luc - bass
Andy - guitar
Katrin - drums, voice
Tom Cora - cello

State Of Shock
Hidegen Fujnak A Szelek
King Commie
Crusoe
The Flute's Tale
A Door
Propadada
Batium
Total Preparation
1993
Fire And Ice
Sukaina

Les anarcho-punks de The Ex proposent un foutoir énergique et tellurique qui n'a pas pris une ride.
Là où cet alboume (de 1991 !) est grand, c'est par la rencontre avec Tom Cora qui était un sacré défricheur.
Depuis, les uns ont pris des ans (sans perdre leur talent), Tom n'est plus, foulant depuis 10 ans le dernier chemin (j'imagine toute cette distance parcourue, toutes ces musiques secrètes, toute cette vie éternelle...).

Les rides apparaissent parfois, les cheveux blanchissent ou tombent…
Mais les manifestes restent.

A écouter à fond, en pleine nuit, partout, pour accompagner les derniers soubresauts de notre espèce humaine en voie de décomposition du fait de la névrose d’accumulation issue de la cupidité inextinguible et de l’arrogance destructrice d’une poignée d’humanoïdes clinquants.


lien dans le commentaire

545 - Sylvie Courvoisier "lonelyville" à Graz, le 19 mai 2008


Sylvie
Courvoisier - piano
Mark
Feldman - violin
Vincent
Courtois - cello
Ikue
Mori - electr.
Gerald
Cleaver - drums


Sylvie Courvoisier chez Orkhêstra
Sylvie Courvoisier chez ECM
Le site
Un article sur Citizen Jazz

liens dans le commentaire

7.8.08

544 - Entrez dans la roda (6)

543 - de la rentabilité de la vie et de la théorisation de l'élimination volontaire des non-rentables en fin de vie... des non-rentables pauvres !

Mise à jour le 12 aout 2008 :

Pierre Le Coz contre Le Point : "une déformation grotesque et choquante de mes propos".

Comment manipuler un entretien et faire dire l'inverse à son auteur. Est-ce une tentative volontaire de déstabiliser le CCNE ?

"Avec le vieillissement de la population - que l’on n’a pas correctement anticipé - et la multiplication des pathologies associées à l’allongement de la vie, on s’inquiète des dépenses à venir. Nos ressources n’étant pas illimitées, il faut essayer de les répartir de façon plus rationnelle. Aujourd’hui, on est bien obligé d’admettre que, si la santé n’a pas de prix, elle a un coût. Et les médecins doivent désormais tenir compte du prix des médicaments dans leurs décisions. Notre vision va devenir "sacrificielle" : il vaut mieux correctement prendre en charge un père de famille de 40 ans, qui est rentable pour la société, qu’une personne de 80 ans qui n’a plus toute sa tête. C’est évidemment un constat tragique. Mais nous n’avons pas le choix."
Pierre Le Coz, agrégé de philosophie, Docteur en Sciences de la Vie et de la Santé, Maître de Conférences des Universités à la Faculté de Médecine de Marseille, Président du Centre d’études et de recherches en éthique médicale (CEREM) de l’Espace Éthique Méditerranéen de Marseille, Membre du Conseil d’orientation de l’Agence de la biomédecine et vice-président du Comité NaZional d’Éthique pour Les Sciences de la Vie et de la Santé.

Et accessoirement néo-fasciste.
Car il n'est pas question dans cette affaire de s'en prendre aux vieux "non-rentables" pour l'économie, mais seulement aux vieux fauchés, pauvres, sans les ressources financières nécessaires pour assurer le coût des soins.
Il est là, le néo-fascisme.
Dans la France Sarkoziste, il est possible donc de déclarer que les vieux pauvres seront laissés de côtés.

Fascisme sanitaire

Santé, les fossoyeurs

Prix Mengele 2008

6.8.08

542 - Peter Kowald & Jeanne Lee

Jeanne Lee, vocal
Klaus Hovman b
Peter Kowald b
Marilyn Mazur dr

1) The Star
2) Piece Chora
3) Gate, Gate Paragate
4) Subway Couple
5) Stupid fresh
6) Fire Music

C'était le 21 mai 1990, dans un autre siècle, un autre millénaire...
Ecouter Jeanne chanter.
Entendre Peter jouer.
Atteindre.

(liens dans le commentaire)

541 - Une vie dans des fichiers... Edvige ou le flicage banalisé !


Un décret du 27 juin 2008 a soulevé l’indignation de la Ligue des Droits de l’Homme, du Syndicat de la magistrature, du Syndicat d’éducateurs SNPES PJJ (FSU), de la LCR, du PCF et du PS, car il autorise désormais le fichage, sous le doux nom de fichier « EDVIGE » [1], de toute personne « ayant sollicité, ou exercé un mandat politique, syndical ou économique ou qui joue un rôle institutionnel, économique, social ou religieux significatif ». En clair, tous les citoyens s’étant un jour investis dans la vie publique. On est vraiment dans le film »la vie des autres" puisqu’il s’agit bien de centraliser dans un fichier policier les opinions politiques ou syndicales de tout un chacun, pour peu qu’il soit secrétaire de section syndicale, conseiller municipal, ou membre d’un comité d’entreprise ...

Il est également prévu de ficher toute personne de plus de 13 ans, tout groupe ou organisation dont l’activité est « susceptible de porter atteinte à l’ordre public » et de permettre aux services de police « d’effectuer des enquêtes administratives pour l’accès à certains emplois ou à certaines missions ». Donc, les mineurs considérés comme menaçants par la police figureront dans Edvige, ainsi que toute personne qui voudra passer un concours administratif, ou avoir un emploi dans la sécurité.

La CNIL [2] a elle-même émis des réserves sur le très large accès à ce fichier, puisque tous les policiers et gendarmes de France pourront, « sur demande expresse », consulter toutes les informations relatives aux fréquentations, au comportement, aux déplacements, aux opinions au patrimoine, au véhicule..., avec « photographie et signes physiques particuliers » de l’intéressé.

C’est donc peu dire que ce nouveau fichier est gravement attentatoire aux libertés fondamentales, puisqu’il instaure une présomption de culpabilité avec fichage illimité pour toute personne engagée dans la vie publique et pour certains mineurs soupçonnés d’appartenir à des « bandes ».

Le prétexte de ce fichage massif est l’affrontement de deux bandes rivales dans le 19e arrondissement de Paris, le 21 juin, laissant un blessé grave sur le trottoir, victime en outre d’insultes antisémites. Rachida Dati avait immédiatement annoncé qu’elle allait créer un fichier des « bandes ». Et elle en profite pour l’étendre aux bandes ...de militants politiques ou syndicaux.

Comme d’habitude, on se saisit d’un fait divers malheureusement banal pour donner à la police des pouvoirs disproportionnés : des dizaines d’affaires identiques sont jugées à Paris chaque année, des jeunes de 14 à 20 ans s’affrontant à coup de démonte- pneus et de gazeuses, au motif qu’ils n’habitent pas la même cité, alors qu’ils vivent le même désarroi social et les mêmes discriminations raciales. Le phénomène n’est pas nouveau, il existait déjà dans les années 1960, avec les « blousons noirs ». Mais depuis 2002, l’UMP s’est employée à répondre en termes exclusivement sécuritaires à ces violences qui expriment avant tout une déliaison collective, une décomposition du tissu social liée au chômage de masse des jeunes des cités.

Chaque fait divers a été l’occasion pour Nicolas Sarkozy de faire voter un nouveau texte répressif, dont l’objectif est toujours le même. Stigmatiser comme délinquante une partie de la population considérée comme inintégrable, inemployable, et dangereuse : les jeunes des banlieues, les SDF, les prostituées, les malades mentaux, les étrangers sans papiers..., et maintenant les citoyens engagés, les ficher, et les punir. Comme d’habitude, on claironne une nouvelle mesure répressive, alors que la police et la justice sont déjà parfaitement armées, et même bien trop, sur le plan du fichage. Ainsi 16 lois sécuritaires ont été votées depuis 2002 [3], afin de donner toujours plus de pouvoirs à la police pour contrôler les identités, placer en garde à vue [4], effectuer des perquisitions, poser des écoutes téléphoniques et des caméras de video-surveillance.

De très nombreux fichiers policiers ont été créés, dont le STIC [5], qui contient 7,5 millions de fiches de « mis en cause », conservées pendant 20ans, et le FNAEG [6], qui n’est absolument pas un fichier spécialisé pour les délinquants sexuels, puisqu’y figurent pendant 25 ans les personnes interpellées pour vols, recel, dégradations et violences volontaires, outrages et rébellion.. C’est ce fichier FNAEG qui vaut à des nombreux militants le recueil de leurs empreintes ADN, sous peine d’être condamnés à un an d’emprisonnement.

Le point commun de tous ces fichiers de police est de contenir des fiches de mineurs et de personnes simplement soupçonnées par la police, dont beaucoup n’ont jamais été condamnées.

Ainsi, s’agissant des bandes, il existait déjà, avant l’annonce de la création d’un fichier spécial, la possibilité de retrouver les mineurs ou les majeurs membres de groupes violents avec le STIC, le FNAEG....et le fichier « CANONGE », fichier policier légalisé par la loi 12 décembre 2005. Il permet à tout service de police judiciaire de classer par caractéristiques les personnes interpellées dans les années précédentes ; sur un simple clic d’ordinateur, la police peut retrouver une personne déjà connue, correspondant à un critère précis. Par exemple, si une victime a remarqué que son agresseur portait des lunettes, ou la barbe, ou avait une tâche sur le visage, ou telle couleur de peau, la police fait défiler sur l’écran des dizaines de photographies comportant ce signe particulier, avec une légende concernant les antécédents de la personne,

Evidemment , le critère d’appartenance à une « bande »peut être lui aussi être entré dans le fichier Canonge, comme tous les autres critères, et sélectionné en cas de bagarres pour rechercher les auteurs. Si tant est, d’ailleurs, que ce critère ait un sens, alors qu’un adolescent peut très bien fréquenter des copains de son quartier sans pour autant être dans une bande organisée !

C’est ce que n’avaient pas vraiment compris les « Renseignements Généraux » [7], qui avaient tiré de fumeuses explications « ethniques »des émeutes des banlieues en 2005, dans un rapport qui leur valu une plainte de SOS racisme.

C’est ainsi des principes tels que la présomption d’innocence, le droit à la protection de ses données personnelles, le droit à la sûreté [8] sont déjà fortement mis à mal par l’existence d’ innombrables fichiers de police [9], au nom de la « sécurité ».

Pourquoi donc créer ce nouveau fichier EDVIGE, si ce n’est pour permettre à la Garde des Sceaux, Rachida Dati, de réoccuper l’espace médiatique qu’elle a perdu, en faisant d’une pierre deux coups : le fichage des mineurs des cités et celui des militants ?

L’utilisation politique de la sécurité et de l’idéologie victimaire est un ressort constant de ce gouvernement, dès qu’il s’agit de masquer le tragique échec des promesses présidentielles en matière de chômage et de pouvoir d’achat.

Le populisme pénal permet depuis 6 ans à l’UMP de remplacer l’antagonisme dominants/dominés, par le clivage coupables/ victimes. Même les grèves donnent lieu à cette analyse, les usagers étant les otages-victimes et les grévistes étant les coupables.

Chacun est ainsi renvoyé à sa faute et à sa responsabilité individuelle, qu’il s‘agisse de problèmes de délinquance, de santé publique, d’éducation, d’immigration ou d’emploi.

Le véritable objet des lois sécuritaires est bien là : Il ne s’agit pas de lutter réellement contre la délinquance. Les chiffres calamiteux de la hausse des violences contre les personnes attestent d’ailleurs de l’inefficacité totale de la politique de tolérance zéro du gouvernement [10].

Le bénéfice idéologique recherché de cette idéologie sécuritaire est bien de masquer les réelles inégalités économiques et sociales de ce pays, la police étant utilisée comme le bras armé de la substitution de l’état pénal à l’état social.

E Sire-Marin, magistrat, Fondation Copernic

* ces analyses sont développées dans un livre collectif à paraître chez syllepse en septembre 2008« l’indigent et le délinquant, punir les pauvres ».

Notes

[1] « Exploitation documentaire et valorisation de l’information générale »

[2] CNIL : Commission nationale de l’informatique et des libertés

[3] Voici la liste des 16 lois sécuritaires votées depuis 2002, auxquelles il faut ajouter deux autres textes pénaux de caractère technique sur les juges de proximité et l’équilibre de la procédure pénale : Loi programmation de la justice du 3 août 2002/ Loi Perben 1 du 9 septembre 2002/ loi Sarkozy du 18 mars 2003 sur la « sécurité intérieure »/ Loi sur l’immigration du 26 novembre 2003/ Loi sur l’asile 10 décembre 2003/ loi Perben 2, « criminalité organisée » du 9 mars 2004/ Loi 26 janvier 2005 sur les juges proximité/ Loi 18 novembre 2005 sur la déclaration de l’état d’urgence/ Loi 12 décembre 2005 sur la récidive/ Loi 23 janvier 2006 contre le terrorisme / Loi 31 mars 2006 ,« égalité des chances »/ Loi immigration 26 juillet 2006 « immigration choisie »/ Loi prévention délinquance 15 mars 2007 / Loi récidive 10 août 2007/ Loi Hortefeux 20 novembre 07 sur les étrangers (tests ADN )/ Loi rétention de sûreté du 25 février 2008.

[4] Le nombre de gardes à vue a doublé depuis 2000 : 562 000 personnes ont été gardées à vue en 2007. Ce sont surtout les étrangers en situation irrégulière qui sont concernés par cette augmentation exponentielle des gardes à vue (ils représentent le quart des gardes à vue) et les usagers de stupéfiants , cannabis et crack surtout(43 000 en 2007 !)

[5] STIC : système de traitement des infractions constatées ; il est consulté 30 000 fois par jour (Le Monde 2007)

[6] FNAEG : fichier National automatisé des empreintes génétiques, créé par la loi Vaillant du 15 nov. 2001, dite « sécurité quotidienne », et étendu par la loi sécurité intérieure du 18 mars 2003. Il contient déjà 500 000 ADN.

[7] Les renseignements généraux ont fusionné avec la DST, au sein de la nouvelle DCRI (Direction Centrale du renseignement Intérieur), depuis le 1er juillet 2008 . On peut d’ailleurs se demander si le fichier Edvige n’est pas créé afin de donner un puissant outil de surveillance à ce nouveau service concentrant deux polices politiques jusqu’ici concurrentes.

[8] La Déclaration des Droits de l’Homme de 1789 n’a jamais proclamé le droit à la sécurité, mais le droit à la sûreté, c’est à dire le droit de ne pas subir l’arbitraire de l’état, ce qui est bien différent.

[9] 33 Fichiers de police et de gendarmerie ont été recensés en 2006 par Alain BAUER, président de Observatoire national de la délinquance(http://www.ladocumentationfrancaise...).

[10] Les violences contre les personnes ont augmentées de 14,1% depuis 2005 ( sur la Seine ST Denis la délinquance a augmenté de 7,6 % depuis janvier 2006), chiffres de l’observatoire national de la délinquance.

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