LA MUSIQUE N’EST PAS UNE MARCHANDISE !
Appel des 333 — Non au Centre National de la Musique !
Le ministre de la Culture vient d’annoncer publiquement la création
prochaine d’un Centre National de la Musique en s’appuyant sur le
rapport « Création musicale et diversité à l’ère numérique ».
Force est de rappeler qu’en aucun cas, les artistes, dans leur
diversité, n’ont été consultés ; ce qui augure mal de la défense de la
diversité culturelle dont se prévaut le rapport.
Par contre, les représentants des industries culturelles (majors et
gros entrepreneurs de spectacles) l’ont été amplement. Et pour cause,
ils seront les bénéficiaires de cet organisme dont le conseil
d’administration aura un président nommé par l’État, une majorité de
membres représentant l’État, et puis quelques personnalités désignées
(par qui ?). Aucun représentant des organisations professionnelles et
des artistes n’est prévu(1). Bonjour, la démocratie !
Sans même s’attarder sur les financements encore hypothétiques de
ce centre, nous constatons que l’orientation en est erronée. Le rapport
stipule que les principaux bénéficiaires seront les « investisseurs ».
La grossièreté du propos est telle, que la musique est définie, disques
et spectacles vivants confondus, comme étant une « filière » économique.
On pourrait ajouter au même titre d’ailleurs que la filière du soja
transgénique ou du poulet élevé en batterie.
Par-delà le charabia, les précautions verbales d’usage et la
distribution de quelques miettes pour amadouer les naïfs, il saute aux
yeux que le but de ce CNM est de soutenir les « investisseurs » à
produire des machines à tubes commerciaux. Or c’est justement la
concentration économique de la production musicale entre les mains de
quelques grands groupes économiques et médiatiques (majors et filiales,
grande distribution qui a tué les disquaires indépendants), agrémentée
des conceptions « marketing » de ces mêmes majors et leurs suivistes qui
porte la responsabilité des difficultés de ce secteur. «Voler à leur
secours » comme le préconise le gouvernement actuel en leur donnant la
totalité du pouvoir n’améliorera en rien la vie musicale, mais
l’aggravera.
Les dégâts sociaux et crises dramatiques provoqués par le « Tout
Rentabilité Financière » dans le monde entier aujourd’hui sont
suffisamment évidents pour considérer scandaleuse cette extension de la
main mise du marché sur la musique grâce au concours du ministère de la
culture. Rappelons que la musique n’est pas une marchandise mais un art.
Rappelons que la musique n’est pas la propriété privée de Universal ou
Sony, de Fimalac, Lagardère active ou Live Nation. La musique est un
bien public. Rappelons que les artistes et le public ne sont pas au
service des producteurs mais l’inverse.
Avec le CNM s’organise une disparition programmée du ministère de
la culture et la privatisation des politiques culturelles. Depuis de
nombreuses années, nous assistons à une dégradation voulue des
politiques publiques culturelles à l’image des attaques que subissent
les autres secteurs du service public (santé, éducation nationale,
transports etc.). Les artistes musiciens connaissent des difficultés
accrues en raison des budgets dérisoires accordées à la musique vivante
et aux réseaux artistiques de diffusion et distribution (scènes et
disques).
Nous voulons une redynamisation des politiques culturelles qui
passe entre autre par une augmentation budgétaire et une distribution
des subventions publiques réellement démocratique, transparente et
répondant à des critères exclusivement professionnels. L’argent existe
pour cela, il est entre les mains de tous les bénéficiaires des cadeaux
fiscaux octroyés aux privilégiés et des spéculateurs (souvent les mêmes)
qui ont fait de la dette publique une manne rentable pour leurs
intérêts. Il faut leur reprendre notre argent, l’argent public.
Nous voulons que cessent ces politiques menées dans l’intérêt de quelques intérêts privés.
Nous disons non au Centre National de la Musique !
Nous exigeons un renouveau sensé des politiques culturelles en direction de la musique.
Nous en sommes les acteurs et les producteurs ! Nous appelons à une mobilisation de tous pour la défense de la Musique !
(1)
Depuis que cette pétition a été lancée, une concertation précipitée
agite la dite “filière”. Le projet CNM est désormais accompagné d’un
protocole d’accord dont les concessions formelles - une représentation
minoritaire d’organisations professionnelles - permettent le financement
de la mise en place du CNM sur le budget du Ministère de la Culture (15
millions d’euros minimum – sans dépenses justifiées - sont annoncés).