31.12.07

297 - Camille se liv(r)e !!!



Attention, dernier message de l'année, pour simplement commettre une fois de plus un truc répréhensible ! Je n'ai pas le droit de diffuser ainsi de la musique.
C'est illégal, et cela vole l'artiste. Mais pas seulement l'artiste...

Le débat sur la chute des ventes de CD est parfaitement expliqué dans le dernier n° des "Allumes du Jazz", auquel vous pouvez vous abonner.
En plus, c'est gratuit.

C'est la première fois que je lis un texte aussi précis sur les responsabilités de la chute des ventes des CD.

Pour info, vous pouvez même télécharger (en pdf) ce numéro. Ah, les Allumés sont quand même sympa. En plus, c'est aussi un label qui distribue tellement de belles musiques qu'on entend jamais sur les ondes privées et publiques, sauf sur les quelques rares dernières radios associatives...

Qu'est-ce qu'on dit ? Merci les Allumés.

Bon, je ne vais pas vous embêter plus longtemps, surtout que vous allez certainement lire ce message alors que votre tête sera emplie de bruits parasites.

Pour les autres, ceux qui passeraient avant ce soir, tentez Camille en Live pendant les festivités.
Ca décoiffe !

Allez, bonne fin !

(ce message va s'autodétruire dans les .... heures, et le blogue peut-être aussi, d'ailleurs, donc)

*** lien supprimé ***

27.12.07

296 - scintillements

la lumière se regarde
3 fois
scintillements


l'arbre filtre
et protège
trop de lumière blesse




un peu de glace
juste assez pour de la lumière
gelée



l'eau est noire
blanche la lumière
où est ton ombre ?



une poussée de verdure
comme une idée floue
ta silhouette

295 - Vic CHESNUTT - Warm

294 - Vic CHESNUTT - Sponge

293 - Vic CHESNUTT - Glossolallia

26.12.07

292 - AHAAH & The Hun Hangar Ensemble



01-Kiraly Siratás [02:32]
02-Zozobra [04:02]
03-Serbian Cocek [04:14]
04-Romanian Hora and Bulgar [03:15]
05-Ihabibi [03:57]
06-Vajdaszentivány [02:36]
07-Oriental Hora [05:18]
08-Dudanotak [03:29]

Donc, c'est un alboume condensé.
Et remuant.
N'hésitez pas, il sera un ami fidèle.

Et pour les puristes, sachez qu'il n'y a que 4000 copies de cet alboume.

*** lien supprimé ***

291 - RIBOT, Marc. Asmodeus, Book of Angel, volume 7


De la lave, du métal en fusion, chauffé à blanc, une forme de barbarie musicale jouissive car libérée des contraintes qui veulent que ne soit écoutable que le "commun", genre plus petit dénominateur, celui que nous subissons sur les ondes "privées".
La bande à Zorn continue à déquiller.
Tant mieux.
La bande à Zorn n'est pas le club des 5. Ce sont des terroristes, selon l'acception actuelle de ce terme : des gens pas normés. Des insoumis à la vulgate des barbares.

Et le "power trio" de cet alboume décape les restes de chairs putrides accrochés à l'os.
Ca racle.

Continuer d'explorer de nouvelles
formes musicales peut être considéré
comme un acte révolutionnaire, car
c'est une manière de montrer qu'il y a
un autre choix que celui de l'argent,
de la futilité, ET de la manipulation
des esprits.
JOHN ZORN

N'oubliez pas le cercle au rayon infini.

Marc Ribot guitare
Trevor Dunn basse
Calvin Weston batterie
John Zorn direction

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290 - North Star Deserter, by Vic Chesnutt


Si je dis "chef d'oeuvre", cela va faire un peu galvaudé.
Tous, nous avons nos passions que nous sacralisons. Certainement un reste de culture liturgique, avec encensoir et psalmodies. Mélopées et complaintes.

Donc, je ne ferais pas l'article.
Cet alboume est un terrain difficile, car catalogué dans le folk-rock existentiel.

Veuillez écouter d'abord, puis renoncer à toutes tentatives de classement.
La vie n'est pas classable.

(lien où vous savez)

Voici des renseignements techniques...

T R A C K L I S T I N G

01 Warm
02 Glossolalia
03 Everything I Say
04 Wallace Stevens
05 You Are Never Alone
06 Fodder On Her Wings
07 Splendid
08 Rustic City Fathers
09 Over
10 Debriefing
11 Marathon
12 Rattle

P E R S O N N E L

Vic Chesnutt: guitar, casio, lyrics, voice

With:
Thierry Amar: contrabasse, electric bass, singing
Howard Bilerman: drums
Bruce Cawdron: bowed vibraphone and glockenspiel
Jem Cohen: field recordings
Eric Craven: skateboardthing
Beckie Foon: cello, singing
Scott Gilmore: drums
T. Griffin: guitar, field recordings
Genevieve Heistek: viola
Ian Ilavsky: singing
Chad Jones: guitar, singing
Efrim Menuck: guitar, piano, harmonium, casio, singing
Jessica Moss: violin, singing
Nadia Moss: organ, piano, singing
Guy Picciotto: guitar, field recordings
Sophie Trudeau: violin

*** lien supprimé ***

289 - Silver Lake, s'y noyer.



Faire la tracklist ?
Donner le nom des musiciens ?
Et pourquoi pas traduire les textes ?
Voire raconter des anecdotes sur sa vie ?

Vic Chesnutt est un artiste. Voilà.
Son truc ?
La beauté de la douleur.
Même avec légèreté.
Mais attention.
Il y a des flèches terribles qui nous foudroient.
Définitivement.
Il y a des arrières-pensées, c'est évident.
Rien à voir avec la distraction, l'amusement, l'entertainment.
Je sais.
Une chanson reste une chanson.
Mais certaines sont beaucoup plus.
Des morceaux de vie.
De sa vie.

*** lien supprimé ***

288 - MonK'O'MaroK "Végétale"



Alima Hamel (vocal)
Laurent Rochelle (soprano saxo, bass clarinet, synth, whistles, melodica)
Sylvain Fournier (bass, samples, vocals)
Loïc Schild (drums, percussions, glockenspiel)

+ guests :
David Thompson (violin)
Brahim Dhour (violin, oud)

Le site MySpace de MonK'O'MaroK

Le site de MonK'O'Marok

(où vous trouverez des extraits "live" !!!).

Achetez les alboumes et surtout osez vous déplacer pour les voir sur scène !!!!!!!


(lien vous savez où, mais attention, ce lien ne sera valide que peu de temps...M'O'M doit vendre des alboumes pour vivre, et doit aussi faire de la scène, donc allez les voir, réclamez qu'ils soient programmés, leur univers musical n'est pas que de la distraction "culturelle").

*** lien supprimé ***

24.12.07

287 - DeVotchKa : indispensable



Etant dans l'incapacité d'exprimer ce que DevotchKa est (une petite fille), à la fois AHAAH (A Hawk And A Hackshaw) et Beirut, tout en étant un cran au-dessus, avec un brin de Calexico, en étant absolument original et unique, je ne peux que vous proposer de foncer acheter cet alboume totalement indispensables.
Une fois dans l'écoute, vous serez définitivement accro. L'option mélodies et chants des balkans sous influence jazz manouche et folk et rock et ...
Il y a même une chanson en français.
L'alboume date de 2004. Foncez l'acheter et réservez le suivant, prévu pour 2008. DeVotchKa est GRAND.

You Love Me
The Enemy Guns
No One Is Watching
Twenty-Six Temptations
How It Ends
Charolette Mittnacht
We're Leaving
Dearly Departed
Such a Lovely Thing
Too Tired
Viens avec moi
This Place Is Haunted
Lunnaya Pogonka
Reprise

*** lien supprimé ***

22.12.07

286 - La filière finnoise, 3 fois : ISLAJA / Merja KOKKONEN (Savez-vous parler finnois ?) : c'est 3 fois Xmas !


1 Kristallipallosilmät
2 Kenen Maa
3 Emoa Ikävä
4 Kämmen, Kynsi, Kieli
5 Kukkia
6 Haikea, Kirkas
7 Sata Naakkaa Sitten
8 Majassani Nukut, Kataja
9 Valo Vedestä
10 Viimeisellä Rannalla
11 Harhojen Perhe
12 Halpaa Kultaa
13 Aallot Ja Äänet



1. Laivat saapuu
2. Rohkaisulaulu
3. Uni pöllönä olemisesta
4. Palaa aurinkoon
5. Haaveilija
6. Senkun tanssitaan
7. Sateen tullessa
8. Rukki
9. Tule puutarhaan
10. Vaeltajan laulu
11. Rukous



1 Kutsukaa sydäntä
2 Sydänten ahmija
3 Pete P
4 Laulu jo menneestä
5 Pysähtyneet planeetat
6 Muusimaa
7 Varjokuvastin
8 Muukalais-silmä
9 Suru ei

C'est comme (je suppose) une drogue. La voix de Merja KOKKONEN (celle de KEMIALLISET YSTÄVÄT entre autres...) ne peut pas nous laisser indemneSSSSS.

Partir avec ces 3 alboumes est une expérience unique.

Ce sera la musique de vos nuits et de vos vies. Le courant "folk-psychédélique-finnois" sera l'écrin de vos nuits de pleine lune. Rester éveillé à tous prix pour encore écouter en boucle Merja. Ne plus jamais céder au sommeil, car cette voix est le rêve.

*** liens supprimés ***

20.12.07

285 - pOrtIshEAd live Atp fEstIvAl 12 08 2007




01) Wicca
02) Hunter
03) Mysterons
04) Mystic
05) Glory Box
06) Numb
07) wandering Star
08) Machine Gun
09) Over
10) Sour times
11) Only You
12) Cowboys
13) Roads
14) Peaches

*** lien supprimé ***

18.12.07

284 - Anja GARBAREK et son "balloon mood" de 1996



C'est la fille de son papa, l'austère saxophoniste qui ne rigole pas.
Ici, rien à voir.
L'univers unique d'Anja porte des traces puissantes de légèreté, de sons bricolés, de voix douces et terriblement sensuelles (elle chante uniquement pour mon oreille, là, tout près, de son timbre diaphane dont je ne me lasse pas) et de mélopées bruitistes électro-jazzy pas tristes du tout.
Sacré mélange.
A bonne dose, très chaudement recommandé, pour les matins (trop) calmes.

1. Beyond My Control
2. I.C.U.
3. Just One of Those Days
4. Picking up Pieces
5. Cabinet
6. Something Written
7. Strange Noises
8. Telescope Man Says
9. She Collects (Stuff Like That)
10. Balloon Mood

*** lien supprimé ***

16.12.07

283 - Se rapprocher du paradis : Patrick Watson... (après "Ma Fleur")

Je (ne) sais (pas) quoi dire sur Patrick Watson.

Evoquer Paul Mac Cartney, Nick Drake, Jeff Buckley et même Pink Floyd ?... Et aussi les ... Beatles ?!?! Et même Robert Wyatt. Oui, sans hésiter.

Pourquoi pas.

Mais même ainsi, cela ne sera pas assez. C'est dire si Patrick Watson reste une entité.
Car il est urgent de dépasser les sensations d'influences (elles sont là, présentes, fortes, intemporelles) pour aborder la singularité de ce compositeur - chanteur d'un talent unique et immédiat dont l'univers onirique reste l'une des plus belles merveilles de ces dernières années, doué de piano et de voix, de sons et d'émoi.

Sur "Ma Fleur" de Cinématic Orchestra, il nous foudroie de sa voix et de ses talents.
Ici, il nous embarque pour une traversée inachevée, dans le sens où personne ne veut qu'elle ne s'achève.
J'embarque. Pour un voyage sans fin en "merveille".

*** lien supprimé ***

282 - Esbjörn Svensson Trio Live in Stockholm (2003)


1. Good Morning Susie Soho
2. From Gagarin’s Point of View
3. Definition of a Dog
4. The Face of Love
5. Intro Bowling
6. Bowling
7. Dodge the Dodo
8. Round Midnight
9. Bemsha Swing

Voici la bande son de ce dévédé.
Libre à vous de l'acheter, cela reste l'un des trios les plus "power" actuels. Une belle démonstration de maîtrise, de douceur et de puissance débridée (je sens que je tutoie des sommets en terme de critique... en même temps, c'est dimanche !)

*** lien supprimé ***

281 - Esbjörn Svensson Trio Live in Göteborg (bootleg) 2005

1 The rube thing
2 Eighty eight days in my veins
3 Viaticum
4 Mingle in the mincing machine
5 A picture of Doris travelling with Boris - Why she couldn't come - The unstaable table & the unfamous fable
6 When god created the coffee break
7 Spam Boo Limbo

Voilà.
Ce sera tout. C'est un "pirate" qui circule depuis quelques temps sur les réseaux, mais à chaque fois, sans les titres.
Avec une "pochette" hideuse que je ne poste pas.
Je précise que je ne suis pas férocement adepte des grosses machines, mais j'étais très fan de "The lamb lies down on Broadway" dans une époque lointaine, ceci explique cela.

*** liens supprimés ***

9.12.07

280 - Charalam.... etc !



Lire ici (c'est très bien dit).

*** lien supprimé ***

279 - Ma Fleur


Cet alboume a certainement fait le tour du monde.
Normal, il le mérite amplement.
Et ce tour passe par ici, maintenant, là.
Une pure merveille, une splendeur définitive, une parenthèse essentielle.

*** lien supprimé ***

278 - des pistes, des traces, des mots

277 - Les Mots Dits de Bashung dans les grands espaces (nouveaux liens)




Les liens de ce messages sont clos.
D'où de nouveaux.
Ne surtout pas imaginer que ce dimanche pluvieux vous met à l'abri.
Même ici, il vous dit.

*** liens supprimés ***

7.12.07

276 - Yungchen Lhamo "Coming Home", du Thibet


Le label de Peter Gabriel (Real World) fait partie du "patrimoine" mondial de la musique. Un peu comme s'il était inscrit à l'UNESCO... (mais non, je plaisante).

Ce qu'il y a d'agaçant avec le label "world", c'est qu'il est la somme de toutes les musiques mélangées et métisses qu'il faut bien ranger dans une boîte "vendable". C'est plus facile de s'y retrouver, surtout pour les entreprises d'amusement.

Mais voilà.

Il y a chez Peter Gabriel une démarche tellement sincère que je lui pardonne (dans ma très grande magnanimité - ???) d'avoir inspiré tellement de faussaires. Comment pourrait-il être tenu pour responsable du détournement de sa passion ?

Alors voilà la voix et la magie de Yungchen LHAMO.
Rien que la liste des musiciens est une offrande au métissage, seule perspective joyeuse de ce millénaire terminal (pour notre espèce) dans lequel nous nous enlisons, marais mouvant dans lesquels notre espèce infra-animale sera engloutie, corps et âmes.

Âmes qui se ressourcent en écoutant Yungchen. Non, je ne vire pas mystique, mais le beauté et la grâce sereine peuvent aussi nous toucher.

Et je le suis.

1 Happiness Is...
2 Sky
3 Heart
4 Per Rig Chog Sum
5 Khyab Sangye
6 Ngak Pai Metog
7 Dream
8 Defiance
9 Coming Home

David Rhodes Guitar
Hector Zazou Sound Effects, Producer, Engineer, Loops, Cello Arrangement
Patrick Morgenthaler Cello Arrangement
Ben Findlay Vocals (Background), Engineer, Mixing
Yungchen Lhamo Vocals, Main Performer, Liner Notes
Sister Soleil Vocals (Background)
Daniel Yvinec Bass
Chris Liliedahl Percussion
Richard Bourreau Violin
Henry Frayne Vocals (Background), Guitar
Hossam Ramzy Percussion
Caroline LaVelle Cello
Peter Gabriel Drones

*** lien supprimé ***

5.12.07

275 - De Smilla à la Petite Fille

Dans "Smilla et l'amour de la neige", il y a un moment où l'héroïne décrit le mécanisme de la destruction des Inuit (c'est le thème principal de ce roman effrayant).

Isolés pendant des siècles, ils ont été colonisés d'une manière brutale, cruelle et rapide. Ce qui était leur histoire, leur mode de vie, ce qui faisait ciment, tout cela a été éradiqué par "l'appel à l'avidité sous toutes ses formes".

Et cet appel s'accélère. Ravage tout. Voir comment cette cupidité passe en surmultiplié aujourd'hui, lissant toutes les cultures pour réduire les gens en une masse avide et cupide, laissant de plus en plus de gens en bordure, dans les fossés. Liquidés. Je liquide à la Bourse et je liquide donc des gens.

Si lire Smila vous tente, sachez que l'histoire illustre bien cette cupidité qui mène les hommes à tuer... un enfant. Et aujourd'hui, combien d'enfants meurent ?

Aujourd'hui, Peter HOEG revient avec un roman-univers époustouflant : "La Petite Fille silencieuse".

Avec une couverture monumentale (pour l'édition française !!!) de Ray CAESAR (qui fut l'alibi d'une pause) :




Ceci est donc un (des) conseil(s) de lecture....

274 - La langue et ses trésors


Alors qu'il est réédité en coffret (3 CD, rien que ça !!!), voici ici ce manifeste lexical et musical, en faveur de la langue, tel qu'il a été publié il y a ... longtemps.

Faire état de ses passions pour les mots dits reste encore une aventure risquée. Celle-ci, en provenance du Québec, est vivante. J'envie celles et ceux qui vont découvrir ce trésor, et je partage pleinement le bonheur des autres, qui savent que cet alboume est un monde.

Infini.
Incongru.
Foutraque.
Improvisé.
Intemporel.
Jouissif.

Un alboume d'amoureux. Qui aiment la langue. Pour les amoureux.

Rene Lussier : guitar, 6-string bass, casiotone, percussions, ambiences, voice
Jean Derome : saxophones, flutes, keyboards, voice
Fred Frith : bass, violin, piano
Claude Beaugrand : magnetic ambiences, voice
Claude Simard : contrebasse
Alain Trudel : trombone, euphonium
Celine Chaput : voice
Jean-Denis Levasseur : clarinet
Richard Desjardins : voice
Pierre St-Jak : piano
Tom Cora : cello

1. - La Française du début
- Le non-lieu
- Vox pop 1
- Le départ des aventuriers

2. - Arts et traditions (direction 1)
- L'heure du dîner (archives 1)
- Les 2 soeurs de trois-rivières (direction 2)
- Rue Principale
- Montage 28 (archives 2)

3. - La visite de Charles de Gaulle
- De Gaulle revisité
- L'Anglaise du Québec (direction 3)
- Kiki
- Manifeste du F.L.Q

4. - Vestibule
- Ce ça qu'on va faire!
- Le gars du Irving (direction 4)
- Le tic-tac d'la veille
- Le blues des résultats
- Lend'main d'veille
- Qui se souvient? (text: Desjardins)

5. - L'appel d'la pelle (direction 5)
- Ya tout' mon estime
- Le manifeste du F.L.Q. (instrumental)

6. - Le message d'la reine
- Échange de bar

7. - Fanfare et tradition (vox pop 2)
- L'indecise

8. - C't'écoeurant
- Vestibule leger (direction 6)
- Ma mere
- Ha bein çe l'fun

9. - Ouin çé ça (vox pop 3)
- Vous me m'nez à bout
- Le commercial

10. - Mme Xavier Martin revisitée
- Le p'tit Jésus de M. Chose

11. - Le Diable (archive 3)
- L'enfer (Le reel de l'estime)
- Le réveil

12. - L'amygdalite à Duchesne (téléphone 1)
- Wow bec!

13. - On peut parler (téléphone 2)

*** lien supprimé ***

2.12.07

273 - Les géographies d'Hector ZAZOU (13 proverbes africains)


Une "curiosité" ? Certes, et lointaine, de ces débuts des années 1980.
Déjà, Hector ZAZOU se singularisait dans cet alboume résolument pas commercial.
Si vous fréquentez ces pages, vous savez que ZAZOU est assez présent, au moins ici et un peu encore là

Bon, ben bonne écoute, hein.

- c’est tout ?
- oui
- pas plus ?
- non, c’est une chronique d’endormi
- …
- alors bonne nuit
- mais ce n’est pas encore la nuit
- alors bonne vie
- mais ce n’est pas encore la v… (silence)

"À quoi sert la musique si ce n'est à changer le monde ? " Hector ZAZOU

"Les anglais ont Peter Gabriel, les américains David Byrne, les français Hector Zazou" Jean-François Bizot

*** lien supprimé ***

30.11.07

272 - P 26, furie et silence

Vaguement lié à la contemplation de l’horizon offert, et en même subjugué par les déplacements des fulgurances lumineuses nocturnes en face interne de mes paupières, je cherche des chocs étroits et proches. Coups de hache, bois fendu, copeaux, éclats, grumes et scies.

J’ai soudé mes sens
Accrochés à une étoile qui file.
Innocent.
J’assiste ébahi et stupéfait à la diffusion de ce parfum suave qui accompagne les poussières.
Mesure la force de traînée lumineuse qui statufie les corps composés.
La chute de la lumière reste un spectacle total
Les dernières lueurs sont toujours silencieuses.
Ecouter la lumière.
Entendre la lueur.
Pas la dernière.
Celle d’après.

Je ne (te) vois que dans l’obscurité.

Décomptez-moi. Diminuez la quantité d’une unité. Respectez les quotas. Certains doivent pouvoir ne pas appartenir. Rester entre deux eaux, deux mondes, l’un assoupi, l’autre qui frémit ou bouillonne.

Etre dans la vie, se tenir en dehors, attentif. Entier et partagé. Il n’y a qu’une étoile dans mes nuits, il n’y a qu’une nuit pour les étoiles.

La lumière, juste une idée, pour qui vit sous les eaux vives. Si le silence s’absente, c’est encore du silence. Si la vie se retire, c’est aussi la vie. Mais les étoiles ? Mêmes mortes, elles sont encore lumineuses. Le souvenir de l’étoile nous illumine autant.

Je chute des lointaines contrées, je chemine sur ma voie toute tracée, arc de lumière sombre et plate. Je resterai ce trait lumineux aussi longtemps que tu seras stupéfait et ébahi. Je franchirais aussi les abysses. Même ton repos dans les eaux mortes sera lumineux. Et tu ne sais encore rien des bruits des infrarouges. Des musiques qui bougent. Rouge sang. Poussière de lumière, clartés obscures, traits dans le noir. Ondes et brouillards.

J’entends les silences alentour et les présences lointaines
Les puissances sereines.
Mes âmes et mes peines.


1 EXTENZ'O – Jatropha I
2
Benat ACHIARY Ramon LOPEZ Philippe De EZCURRA – Dos hermanos
3
CAMISETAS – No radio 4
4 4 WALLS – Fine Wather (Poem by Ho Chi Mihn)
5
Franck VIGROUX – Et j'ai vu dans le miroir
6 ART ENSEMBLE OF CHICAGO – Promenade Cote Bamako II
7
Bijan CHEMIRANI & Ross DALY - Gulistan
8
Mari BOINE - Mu Ustit, Engeliid Sogalas
9
CHALARAMBIDES – Do you see
10
Marc RIBOT's Ceramic Dog – I found a love
11
SVALASTOG – White oak white pine
12
Corrina REPP – I'll walk you out
13 SUSANNA & The Magical Orchestra – Love will tear us appart
14
Bugge WESSELTOFT - Yoyk
15
Jean-Louis MURAT - Dordogne

(lien dans le commentaire)

271 - Death Ambient "Drunken Forest"


Fermez tout. Débranchez le téléphone et toutes les autres sources possibles de parasitage. Il n’est pas question de vous laisser distraire, dans le sens où l’industrie de la « distraction » a terriblement réussi à atteindre son but : détruire le sens même de la beauté.

De l’émerveillement.

De la surprise.

Depuis quand, déjà, avez-vous été secoué par une aventure culturelle, sensorielle, esthétique et populaire ?

Si vous traînez vos bottes par ici, vous pouvez noter que parfois, je me laisse aller.

C’est humain.

Je ne suis pas une vigie seule dans sa tour (un peu quand même), je n’ai pas la prétention de désigner et donc d’éliminer (sauf que j’adorerais éliminer parfois ce qui justement relève de la distraction, de cette manière de nous faire détourner nos sens de l’essentiel pour mieux nous envahir avec ce qui nous asservi, nous transforme en animal docile et terriblement prévisible). Je n’ai que parfois des intuitions, des frissons épidermiques et des visions d’astres épinglés au firmament, les nuits d’insomnies.

Prétentieux, tout cela, hein ? Oui, terriblement prétentieux, et je ne suis pas enclin à en rabattre.

Car là, il est question d’un astre. Celui de « Death Ambient ».

« Drunken Forest » est le 3° alboume de ces défricheurs sonores. Oui, il reste encore tellement de territoires encore inexplorés, que lorsque des étoiles sonores viennent ainsi transpercer nos chairs, nous ne pouvons que leur reconnaître au moins une qualité élémentaire, tellurique et vitale, celle d’être des vigies potentiellement dangereuses pour « l’ordre des choses » : cet ordre que les marchands de distraction tentent de maintenir coûte que coûte, au service d’intérêts avilissants. La dernière tentative de cadenasser internet n’en est que plus flagrante.

Foncez acheter cet alboume et les autres. Dites à vos proches que vous partez. Invitez les à partager ce voyage.

Fermez tout. Pour mieux vous laisser envahir par ces nappes, ces sons, ces boucles, ces mélanges, ces paysages, …


Personnel:

Fred Frith: Electric Guitar
Ikue Mori: Laptop Computer
Kato Hideki: Acoustic And Electric Bass, Acoustic Guitar, Analog Synthesizer, Violin, Banjo, Mandolin, Accordion, Ukelele, Electric And Lap Steel Guitar, Vocals, Soprano And Alto Recorder, Glasses, Ice And Water /
Special invité :
Jim Pugliese: Percussion

15.11.07

270 - de la guitare


1. Frozen Gtr
2. The Shape Is In A Trance
3. Honest James
4. Silver Blue
5. Fri/End
6. American Coffin
7. Wonderful Witches
8. Off Work
9. Never Light
10. Free Noise Among Friends
11. Trees Outside The Academy
12. Thurston@13

Je ne comprends pas les paroles, mais musicalement, c'est très bien.
Ceci est une non-critique.
Pas besoin.
Vous trouverez partout sur internet de bien meilleures appréciations que celles que je pourrais tenter de vous infliger.
Non, ne croyez pas que je vire "noisy" et "bruitiste", c'est seulement que j'aime vraiment beaucoup cet alboume.
Et qu'il n'est pas "noisy".
Après 30 ans d'underground punk et noisy, voici une "délicate" surprise, où le guitariste emblématique de la scène "bruitiste" nous offre des "mélodies" biscornues fluides.
Allez comprendre.

Et nous avons bien besoin de mélodies, même biscornues, pour supporter toute la boue actuelle qui voudrait nous faire croire que c'est comme ça, maintenant, et éternellement.
Le "rêve" des tyrans d'hier est en voie de se réaliser aujourd'hui.
Depuis les salades de la "fin de l'histoire", qui n'est que la théorisation de la soumission à un système dont on nous dit qu'il est le seul, l'unique, (et que toute résistance est inutile, vu qu'il est le seul), nous assistons aux mêmes mensonges que ceux proférés par les tyrans qui rêvaient d'un royaume pour 1000 ans.

(non, non, ceci n'est pas un blog "politique", juste une piqure de rappel à destination de mon humble personne. Comme vous devez être 10 personnes à parfois fréquenter ce lieu, je reste presque dans les limites du journal très perso. Allez, j'aime beaucoup cette phrase : "Veuillez cesser toute résistance", c'est celle que l'on nous serine tous les jours, partout, sous toutes les formes, et par tous les canaux possibles.)

(lien dans le commentaire)

269 - Karl KRAUS, à relire d'urgence.


"Ne pas avoir d'idées et savoir les exprimer: c'est ce qui fait le journaliste".

Les faits mis en scène ici par Karl Kraus se sont réellement produits ; les conversations les plus invraisemblables ont été tenues mot pour mot ; les inventions les plus criardes sont des citations ; les récits prennent vie sous forme de personnages, les personnages dépérissent sous forme d’éditorial ; la chronique a reçu une bouche qui la profère en monologues, de grandes phrases sont plantées sur deux jambes – bien des hommes n’en ont plus qu’une. Quiconque a les nerfs fragiles, bien qu’assez solides pour endurer cette époque, qu’il se retire du spectacle.

« Au secours, les tués ! Assistez-moi, que je ne sois pas obligé de vivre parmi des hommes qui, par ambition démesurée, ont ordonné que des cœurs cessent de battre, que des mères aient des cheveux blancs ! Revenez ! Demandez-leur ce qu’ils ont fait de vous ! Ce qu’ils ont fait quand vous souffriez par leur faute avant de mourir par leur faute ! Cadavres en armes, formez les rangs et hantez leur sommeil. Avancez ! Avance, cher partisan de l’esprit, et réclame-leur ta chère tête ! Avance pour leur dire où tu es et comment c’est là-bas, dis-leur que tu ne voulais plus jamais te laisser utiliser pour ça ! Et toi là-bas, avec ce visage défiguré à ton dernier instant, lorsque sur ordre la bête sauvage, l’écume aux lèvres, se précipita sur toi — avance ! Ce n’est pas votre mort — c’est votre vie que je veux venger sur ceux qui vous l’ont infligée ! J’ai dessiné les ombres qu’ils sont et qu’ils voulaient par esprit de mensonge transformer en apparence ! Je les ai dépecés de leur chair ! Mais les pensées nées de leur bêtise, les sentiments nés de leur malignité, l’effroyable rythme de leur inexistence, je les ai affublés de corps et je les laisse se mouvoir ! Si on avait conservé les voix de cette époque, la vérité extérieure aurait démenti la vérité intérieure, et l’oreille n’aurait reconnu ni l’une ni l’autre. J’ai sauvegardé la substance, et mon oreille a découvert la résonance des actes, mon œil le geste des discours, et ma voix, chaque fois qu’elle citait, a retenu la note fondamentale, jusqu’à la fin des jours. »

"Karl Kraus, fondateur de la revue satirique Die Fackel (Le Flambeau), a consacré sa vie à analyser le langage et les effets néfastes du journalisme de son époque. Témoin des abus et déviances de ce qu’il appelle, non sans ironie, la liberté de la presse, il a mené une lutte sans fin contre les représentants de ce nouveau visage de la tyrannie. Contestataire acharné de cette forme moderne d’immunité, il a été le spectateur des pires ignominies commises au nom de la liberté.

Les Derniers jours de l’humanité rendent compte de l’odieuse corruption des journalistes pendant la Première Guerre mondiale. Que la guerre soit le paroxysme de la barbarie, Karl Kraus n’en doute pas un instant, mais à ça s’ajoutent la représentation que l’on en fait et sa formalisation verbale. Les Derniers jours de l’humanité sont une tragédie construite à partir de l’information, incontestablement partiale et mensongère puisque pro-militariste, produite entre 1914 et 1918, qui mena, selon Karl Kraus, la civilisation à l’apocalypse et participa au déclin du monde.

L’omniprésence, quasi obsessionnelle, des citations musicales, la foultitude des personnages dont la fonction sociale prime sur l’aspect psychologique rappellent la structure des drames expressionnistes. La cacophonie infernale qui régente l’ensemble de la pièce est à l’image de la société que Kraus entend dénoncer. Une voix cependant émerge difficilement de ce tohu-bohu, celle du dément qui vient démonter le mécanisme de la mascarade : « Je prévois que la folie du jusqu’au-boutisme et la misérable fierté d’infliger des pertes aux autres, que cet état mental pervers d’une société qui respire l’air d’une gloire factice et qui se nourrit d’illusions sur elle-même, laissera en héritage une Allemagne estropiée ! » Cette prophétie, puisque proférée par un personnage déclaré fou par la société, n’est pas entendue. C’est celle d’un auteur isolé, qui sans cesse a tenté de prévenir ses concitoyens du gouffre économique, social et démographique qui attendait l’Allemagne et l’Autriche au sortir de la guerre. Mais la puissance et l’hégémonie de la presse ont déjà abâtardi l’ensemble de la population en brossant le tableau d’une guerre en dentelles : « Combien est différent le héros qu’on a en face de soi dans cette guerre mondiale. Ce sont des gens enclins aux plaisanteries les plus inoffensives, qui ont un doux penchant pour le chocolat chaud à la crème. » Propos édifiants que l’auteur n’a pourtant pas inventés !

Karl Kraus fut le précurseur de Brecht ; on y retrouve ce goût pour les grandes fresques allégoriques qui donnent à réfléchir sur l’état de la société et qui, il faut le reconnaître, sont parfois un peu indigestes à la lecture. Il fut surtout un visionnaire génial, observant dès 1922 le rôle pervers d’un certain type de journalisme qui gave l’opinion publique d’informations soit erronées, soit superficielles. La télévision et son incontournable journal de 20 heures n’existaient pas encore !"
Cécile Casanova
Chronic'art, 05/2000




Rédigée de début mai à septembre 1933, la Troisième nuit de Walpurgis analyse l’installation du nazisme dans les esprits. Pour la première fois traduit en français, ce livre dense et labyrinthique travaille, sous la surface, des événements qui échappent à l’attention de l’historien ; Kraus convoque la littérature et la poésie pour débusquer les responsabilités de ceux qui ont accepté et même demandé le sacrifice de l’intellect au service de la propagande, préparant librement le terrain à l’ensevelissement de l’humanité. La vie de l’écrivain et journaliste viennois Karl Kraus (1874–1936) se confond avec l’infatigable bataille qu’il mena dans sa revue Die Fackel (Le Flambeau) contre la corruption de la langue et donc de la morale.

On sait que l’auteur de la Troisième nuit de Walpurgis a, non seulement pour la documentation qu’il utilise dans le livre mais également pour les jugements qu’il formule sur le nazisme, fait des emprunts importants à des périodiques allemands, y compris ceux qui paraissaient depuis 1933 en exil, en particulier Das Neue Tage-Buch, qui avait émigré de Berlin à Paris. Sur le rapport que les nazis et les intellectuels qui les approuvent entretiennent avec la littérature et la culture allemandes, Karl Kraus et Friedrich Roth sont évidemment en complet accord et dénoncent le même genre de trahison complète. Dans un article paru en 1934 à Prague, Roth écrit : « Même si l’on entretient les tombes de Lessing et de Schiller dans les cimetières, on n’en est pas pour autant, et de loin, les héritiers de Lessing et de Schiller. L’Acropole se dresse encore à Athènes. Il ne vient à personne l’idée de prétendre que le Parlement grec d’aujourd’hui est l’héritier de l’agora. Pourquoi accorder à l’Allemagne actuelle le crédit que lui vaudraient ses ancêtres depuis longtemps reniés par elle, pis encore : falsifiés à force de mensonges ? Un peuple dont Goebbels devient le Lessing a encore moins de parenté avec la vieille Allemagne que les Nouveaux-Hellènes avec Agamemnon ! »
Ce serait cependant une erreur complète de supposer que le problème principal, aux yeux de Kraus, est la défense de la culture menacée par l’espèce de retour à la préhistoire qui est en train de s’effectuer. Ce qui devrait susciter en premier lieu la protestation des représentants de l’esprit n’est pas ce qui est sacrifié dans l’ordre de la culture, mais les souffrances physiques et morales provoquées et les pertes en vies humaines. Kraus n’a pas de mots assez durs pour les intellectuels, incapables une fois de plus de se sentir concernés par autre chose que leurs propres affaires, et les journalistes qui se mobilisent pour la défense de biens culturels qu’ils ont contribué plus que n’importe qui d’autre à dévaloriser.
Les intellectuels qui se sont ralliés au nouveau régime acceptent sans états d’âme l’idée qu’un bouleversement révolutionnaire comme celui qui est en cours ne peut pas s’effectuer sans que le sang coule et qu’il y ait des morts. Officiellement, bien sûr, aucune violence n’est commise, mais en même temps on concède qu’il n’y a jamais eu de révolution sans que quelques excès regrettables soient commis. Selon une déclaration faite à la radio que cite Kraus (c’est évidemment lui qui souligne), « si […] l’on étudie la révolution allemande, on ne doit pas se laisser conduire par certains actes de violence qui ont eu lieu à des conclusions fausses. Dans toute révolution le peuple perd la maîtrise de soi et des actions dépourvues de sens sont commises. N’avons-nous pas vu un bon nombre de méfaits de cette sorte pendant la Révolution française, mais également pendant l’insurrection américaine ? Le soulèvement de la nation sous la conduite de Hitler est une grande et authentique révolution ».

« Kraus n’a pas de mots assez durs pour les intellectuels, incapables une fois de plus de se sentir concernés par autre chose que leurs propres affaires, et les journalistes qui se mobilisent pour la défense de biens culturels qu’ils ont contribué plus que n’importe qui d’autre à dévaloriser. »

La réponse de Kraus à la dernière affirmation est, comme on pouvait s’y attendre : « Justement non ! » Il s’agit de tout ce qu’on veut sauf d’une révolution. Mais la terreur est, pour sa part, bien réelle et a pris une forme qui n’avait encore jamais été observée auparavant. Kraus se scandalise qu’un bon nombre d’intellectuels n’aient pas flairé immédiatement l’escroquerie, mais également que ceux d’entre eux qui ont été capables de le faire se méprennent aussi souvent sur ce qui est le plus grave et le plus intolérable. Quand ils proclament leur hostilité au nazisme, ils ont malheureusement tendance à minimiser, eux aussi, de façon narcissique, la réalité de la violence, sous sa forme la plus élémentaire, et à s’indigner beaucoup plus des torts causés à la culture que des vies humaines détruites. Kraus défend, sur ce point, une position qui, même s’il passe généralement pour un défenseur intransigeant et exclusif des acquis de la grande culture, ne devrait pas surprendre, puisqu’elle était déjà la sienne à l’époque de la Première Guerre mondiale : la valeur qui passe avant toutes les autres et dont un intellectuel ne peut en aucun cas s’arroger le droit de disposer est la vie humaine, y compris et même, d’une certaine façon, surtout celle des plus humbles. Cela résulte du fait que, comme il le dit, les existences même les moins intellectuelles, quand elles sont victimes de la violence, ont plus de rapport avec la vie de l’esprit que ce qui subsiste des affaires de l’esprit.

Jacques Bouveresse
(extrait de la préface à la Troisième nuit de Walpurgis)



Troisième nuit de Walpurgis

Et si surtout la perte de la culture n’était pas achetée au prix de vies humaines ! La moindre d’entre elles, ne serait-ce même qu’une heure arrachée à la plus misérable des existences, vaut bien une bibliothèque brûlée. L’industrie intellectuelle bourgeoise se berce d’ivresse jusque dans l’effondrement lorsqu’elle accorde plus de place dans les journaux à ses pertes spécifiques qu’aux martyres des anonymes, aux souffrances du monde ouvrier, dont la valeur d’existence se prouve de façon indestructible dans la lutte et l’entraide, à côté d’une industrie qui remplace la solidarité par la sensation et qui, aussi vrai que la propagande sur les horreurs est une propagande de la vérité, est encore capable de mentir avec elle. Le journalisme, qui juge mal de la place à accorder aux phénomènes de la vie, ne se doute pas que l’existence privée, comme victime de la violence, est plus près de l’esprit que tous les déboires du négoce intellectuel. Et surtout cet univers calamiteux qui occupe désormais tout l’horizon de notre journalisme culturel jusqu’à héroïser des théâtreux magouilleurs, jusqu’à se livrer à une analyse en profondeur de la psyché des bailleurs de fonds. Le journal de 6 heures lutte pour la libération de l’Autriche, mais sait-on ce que fera Otto Preminger en automne ? Alors qu’on est sur le point d’être avalé par un dragon, on se pose la question de savoir si le festival de Pallenberg sera parfait. Si, autour de la charlatanerie de quelqu’un qui n’a rien à dire, les murmures sur le « génie du Führer » deviennent de plus en plus ardents, c’est peut être qu’il y a un besoin pressant de trouver un ersatz pour ce que la foi aryenne a trouvé dans la mise en scène de Hitler. Mais il est quand même tragique que l’on puisse être détourné de ses effets par de telles niaiseries. Maintenant, les journaleux de la culture ont trouvé une activité annexe qui paie bien : ils sont parvenus à réunir les sphères et à donner aux bavardages de coulisse une perspective politique. La surestimation de ce bien vital, que l’on croyait déjà parvenue au zénith de toutes les possibilités, se révèle encore de façon particulière par confrontation avec le Troisième Reich : celui qui a fait faillite là-bas perd la surévaluation de son talent, et ceux qui, par renversement, jouent les gardiens de la race ne manquent pas non plus de culot. Ce procédé d’un journalisme dont la spécificité résisterait à toutes les mises au pas est développé jusqu’à l’intronisation dans des affaires de concurrence les plus visqueuses et jusqu’au montage de ces fameuses cabales d’affaires qui d’ordinaire n’étaient destinées qu’après coup à notre diète intellectuelle. Les gens en vue, qui rampent là où ils trouvent gage et critique, ne changent pas de conviction mais se recommandent de celle qu’adoptent leurs supérieurs, directeurs et journalistes ; et il est certain que le bouleversement de la situation de la culture, à côté de la médiocrité autrefois soutenue par la presse et maintenant par la race, à côté de la canaille qui se costume maintenant en plein jour pour enlever des rôles à des collègues, a aussi touché ceux qui montraient plus de courage et de dévouement que bien des professionnels qui vivent de leurs ennuis. Même si une hardie force de décision ne lui avait pas ravi son effet d’annonce et l’avait au contraire augmenté à la puissance dix, le journalisme ne serait à la hauteur d’aucune catastrophe car il est lié à toutes. Sa réclamation sur un patrimoine culturel altéré, qui détourne foncièrement de l’essentiel, se fonde sur la notion d’une solidarité où l’humanité est réduite à l’appartenance. Mais vu l’ampleur de la calamité qui s’est abattue sur les participants de professions exposées à moins de problèmes, face à la misère et la mort, face à l’extermination de tant d’existences sociales et physiques, le dommage culturel disparaît et ne redevient considérable que par la méthode et l’essor de ceux qui se sortent de tout, par l’horreur du dédommagement dans cette révolte des petits comparses et des dilettantes. Que signifie donc, face à la fête nationale de la journée du boycott, cette mascarade d’autodafé qui était sûre de récolter un grand éclat de rire de la part de l’Europe, même s’il le devait plus à la méthode ou à l’insuccès qu’à la barbarie des bourreaux ou à la publicité ainsi faite pour les victimes ! Elle était bien propre à apostropher le pathos des collègues et même des personnes concernées. Pourtant, la façon dont la littérature qui est passée à travers a profité de la panique ; la façon dont elle a tiré des leçons du tort fait aux autres; comment elle a tout fait pour persister dans le déshonneur – voilà qui pourrait amener l’instinct des vandales (s’il n’était pas aussi abandonné de Dieu que proche de la nature) à soupçonner qu’il n’a pas attrapé les bons. Ce qu’ont osé affirmer les intellectuels contre un malheur qui frappait bien plus qu’eux-mêmes n’était que la crainte du chat échaudé ou pas encore échaudé. Les personnalités qui, par profession, expriment plus souvent un point de vue qu’elles n’en ont, ont toujours occupé un espace public plus large que celui qui correspondait au besoin social. Cela devient plus fâcheux quand l’expression fait défaut, alors qu’elle serait indispensable, quand il y a suspicion de partialité secrète et de lâcheté publique et qu’il faut ensuite produire des explications qui brouillent ce qui est ambigu…

Karl Kraus
(extrait de la Troisième nuit de Walpurgis)


Disponibles aux éditions AGONE. N'hésitez pas.